THE LOVERS

 

Compétition Compétition Internationale
Genre fantasy
Pays Australie, Belgique, Inde, USA
Audience ENA
Audio Anglais, Hindi
Sous-Titres Français, Néerlandais
Réalisateur Roland Joffé
Cast Alice Englert, Bipasha Basu, Tamsin Eggerton
Scénario Roland Joffé
Soundtracks Dirk Brosse
Production Corsan
Distributeur Corsan World Sales
Année 2015

L’Avis du BIFFF :

La grande barrière de corail en 2020. Jay et sa femme Laura, tous deux archéologues marins, explorent les trésors d’un navire de guerre échoué dans les bas-fonds.
Alors qu’ils découvrent un anneau qui n’a rien à envier à celui qui a foutu le bordel dans les terres du milieu, un accident plonge Jay dans un coma profond.
Mais si son corps ne bouge plus des masses, son esprit, lui, remonte le temps jusqu’en 1778 et se niche dans la caboche d’un certain James Stewart, vaillant soldat écossais en poste aux Indes.
L’époque n’est pas vraiment la plus clémente pour cette colonie britannique, soumise aux nombreuses révoltes de clans séditieux et aux perfidies vénales d’envahisseurs adeptes du five o’clock tea.
Assigné à la protection d’une reine locale, James Stewart va devoir parcourir une Inde sauvage aux dangers plus mortels les uns que les autres, tandis qu’une vieille légende resurgit avec l’apparition de Tulaja, une guerrière à vous faire briser toute la banquise du Pôle nord : une légende qui cause d’un anneau magique, capable de transcender l’amour à travers les âges…

Mon Humble Avis :

Roland Joffé est un réalisateur oscarisé (3 fois) grand connaisseur de l’Inde (« La cité de la joie »), aussi on est en droit d’attendre un film bien documenté et subtil.
Etudions un peu le contexte, en 1778 en Inde, l’événement le plus notable est le siège de Pondichéry.
Le siège de Pondichéry est un épisode de la guerre d'indépendance des États-Unis entre la Grande-Bretagne et la France dans le sous-continent indien.
En effet, le 6 février 1778, la France signe à Paris un traité d'alliance et de commerce avec les Etats-Unis d'Amérique ; dès lors la guerre eut lieu entre la France et l'Angleterre ; elle dura cinq ans.
En 1773, le Parlement vote le Regulating Act qui impose à la Compagnie une série de réformes économiques et administratives.
Il nomme Warren Hastings au poste de Gouverneur Général des Indes britanniques créé pour l'occasion.
La Compagnie est autorisée à conserver le monopole du commerce sous certaines conditions, notamment financières, ce qui l'entraînera peu à peu vers son déclin…
En 1784, une nouvelle loi est votée afin de séparer clairement la gouvernance des territoires des Indes Orientales (qui revient à la Couronne) et l'activité commerciale (qui revient à la Compagnie).
Cette dernière doit donc désormais rendre des comptes à la Couronne ce qui ne l'empêche pas de continuer à se développer…
Le début du film montre bien cette situation, où les grosses huiles de la compagnie des Indes britanniques veulent trouver un moyen de s’enrichir sans tenir au courant les autorités royales de leurs plans.
On est donc bien dans une reconstitution historique sérieuse, s’appuyant sur des recherches précises.

Le message du film parle de la puissance de l'amour au travers de concepts très indiens comme la réincarnation.
En effet, le héros vit une " expérience de mort imminente " qui lui fait revivre mentalement une de ses vies antérieures.
Une expérience de mort imminente (EMI) est une expression désignant un ensemble de " visions " et de " sensations " consécutives à une mort clinique ou à un coma avancé.
L'EMI est un problème-carrefour où se croisent les interprétations transcendantales ou spiritualistes, avec les interprétations physiologiques ou psychologiques.
De nombreux films ont déjà traités ce thème : " Retour de l'au-delà " (From the dead of night), de Paul Wendkos avec Lindsay Wagner (téléfilm), " L'Expérience interdite ", de Joel Schumacher avec Kiefer Sutherland, Kevin Bacon, William Baldwin et Julia Roberts, " Souvenirs de l'au-delà ", de Brett Leonard avec Jeff Goldblum, " La Voix des morts : la lumière " (ou Interférences 2), de Patrick Lussier avec Nathan Fillion et Katee Sackhoff, " Enter the Void " de Gaspar Noe, 2010, " Faux départ ", film documentaire de Sonia Barkallah, 2010, " NDE, le saut dans l'inconnu ", film documentaire de Marc-Laurent Turpin, 2010, " Au-delà " de Clint Eastwood, 2010, " Afterlife, La Vie après la Vie " de Paul Perry, 2011, " La Nuit d'en face " de Raúl Ruiz, 2012, ou " Heaven Is for Real " de Randall Wallace, 2014...
Ici Roland Joffé choisit de mêler l'EMI à l'idée de réincarnation, ce qui lui permet de mêler les genres cinématographiques, anticipation SF (le présent est en 2020), histoire (la vie antérieure en 1778), aventure et surtout romance.
L'amour rassemble les âmes sœurs, malgré tous les obstacles, même le temps...

La réalisation ressuscite le cinéma exotique à grand spectacle, avec un académisme daté modernisé par l’idée fantastique du scénario.

Les cadrages usent de beaucoup de plans larges dans des décors réels imposants, avec souvent des mouvements élégants.
Les gros plans ont des arrières plans flous qui mettent en valeur les expressions des acteurs.

La photographie est d’une qualité supérieure à la moyenne.
Elle est sombre dans le présent, lumineuse dans le passé.
On voit de magnifiques aubes rosâtres, des architectures en contre-jour, et toujours de belles ombres qui sculptent les volumes.

Le montage use de fondus pour les transitions entre les scènes à différentes époques.
Il est énergique dans la première moitié, aventure, combats, romance s’enchaînent sans temps morts, bien qu’il s’agissent de plans longs (même durant les scènes d’action)…
Mais progressivement ça se corse, quelques lenteurs se glissent progressivement ensuite, puis tout le récit semble tomber dans le coma comme son personnage principal !

Les décors sont très différents entre les deux époques : légère anticipation aux états unis en 2020, et exotisme traditionnel en Inde en 1778.
Au départ l’action futuriste est sur et sous l’océan, puis on découvre un port de la fin du 18ième siècle reconstitué avec ampleur et une figuration abondante.
Le palais indien est sublime, en pierre jaune avec des tentures rouges qui ressortent avec intensité, les intérieurs sont riches d’accessoires variés.
On voit aussi pas mal de décors naturels superbes, entre Calcutta et Bombay, comme le marais, ou des collines verdoyantes.
Le plus sympa est la « Gorge du dragon », avec ses cascades qu’on doit descendre en tyrolienne dans un panier.

Les costumes dans le futur sont pas très originaux, à part les scaphandres sous-marins.
La reconstitution historique est plus intéressante, chaque costume est bien détaillé, comme les uniformes anglais ou les tenues indiennes.
Les tenues rouges à la cour s’harmonisent avec les tentures des décors.
Un général indien à une curieuse armure à la romaine, imitant les muscles pectoraux, c’est quelque chose que je n’avais jamais vu dans un Bollywood.
Les belles tenues anglaises, robes comme uniformes, s’abîment au fur et à mesure du périple à travers la nature sauvage, finissant presque en haillons dépenaillés.

Les effets spéciaux sont présents dés la scène sous marine, puis deviennent minimalistes (quelques blessures c’est tout).
Dans la ville hightech il y a quelques améliorations numériques (comme le survol par une hélico en synthèse).

Le casting joue sur la plastique des acteurs(trices) retenues, mais bien qu’ils jouent tous correctement, ce n’est pas suffisamment intense pour nous faire passer la puissance et la pureté (la naïveté ?) des sentiments exprimés, on y croit pas, surtout avec cette pesante insistance de la dernière partie.
Josh Harnett a un accent écossais exagéré, caricatural.
La méchante vicieuse emporte le morceau avec charisme, mais elle est sous exploitée.
Il y a d’autres rôles secondaires sympathiques, comme la petite peste, ou même le vilain nain moustachu !

La musique est très travaillée.
Le compositeur est venu sur la scène du BIFFF pour expliquer son travail.
Dirk Brossé a une collection personnelle de plus de 1000 instruments du monde entier, il était donc le choix idéal pour une bande originale mélangeant les pays et les époques pour nous dépayser.
Pour le futur il use de sons électroniques (imitant néanmoins le classique symphonique), et que des instruments et des mélodies ethniques pour le passé.
Il fait ainsi revivre tout un monde sonore oublié.
Les percussions indiennes se mêlent à des sons étranges de trompes pour nous retranscrire la spiritualité et le mysticisme du peuple indien, tandis que l’intensité symphonique assure les passages dramatiques.

En conclusion, le film est malheureusement trop long, c’est dommage car il avait un bon potentiel, mais c’est peut être trop demander au public cynique d’aujourd’hui d’adhérer à une histoire à la fois aussi abracadabrantesque et naïve… en tout je le reverrais plus tard dans d’autres conditions qu’en compagnie du public chahuteur du BIFFF, pour lui redonner une seconde chance !

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