James Keane – Les mystères de Dragopolis
Genre : Science-fiction - Aventure.
Ecrit par : Guillaume Bouiges.
Musique de : Jafet Meza & Rémy Boutry.
Costumes : Dominique Vilain.
Special Effects : Guillaume Bouiges & Anthony Pujos.
Mettant en vedette : Ashley Levindhead, Jonathan Henry, Adrien Bracquart, Mélanie Vaudaine, Christian Bouiges, Geoffrey Vinchon, Anthony Cheval, Francesco Gigliotti, Giorgio Sebastiano, Franco Magio, Bruno Mouftiez, Marc Cassot, Alan Delabie et Capucine Naili.
Réalisé par Guillaume Bouiges.
Synopsis :
Dragopolis, ville lumineuse à la croisée des temps et de quatre mondes.
Une série de meurtres énigmatiques frappe la ville en une seule nuit.
James Keane, un enquêteur réputé, comprend que les forces infernales se réveillent et menacent l’équilibre de l’univers.
Les portes de l’Enfer sont entrain de s’effondrer, et le chaos règne.
James part en expédition sur un des autres mondes, pour trouver un moyen d’empêcher l’apocalypse.
Mais les démons sont déjà à ses trousses, et l’ennemi gagne du terrain.
Les enfers vont se déchaîner, et un seul homme sera en mesure de les affronter…
Mon humble avis :
Film fantastique à micro-budget (dans les 5000 euros), « James Keane » était présent au Bloody week end 2014, où le réalisateur et deux de ses acteurs tenaient un stand.
C’est là que je les ai rencontrés, et que Guillaume Bouiges m’a généreusement offert un DVD de son film, afin que j’en fasse une analyse critique précise, pour aider à faire connaître le métrage, afin qu’il trouve le public qu’il mérite.
L’histoire du film est d’emblée assez complexe, car elle se déroule dans un « Multivers » composé de plusieurs mondes (à différents niveaux technologiques, comme différentes versions de la Terre à des époques diverses), mais dont la logique et le détail ne nous est pas présenté en introduction de façon claire.
De plus, il n’y a pas non plus de véritable exposition du personnage principal, qu’on doit accepter d’emblée, pour en découvrir un peu plus par la suite, au cours d’un flash-back (du coup un peu longuet)…
En fait, on a un peu l’impression de débarquer à l’improviste dans un club de Jeu de rôle, ou de Grandeur nature, en cours de partie, et de prendre le train en marche, ou de voir l’épisode final d’une série, sans forcément en piger tous les enjeux.
Le plus est l’ennemi du bien, et peut être Guillaume Bouiges a-t-il été trop ambitieux à l’écriture…
Néanmoins, cette histoire abracadabrantesque a le mérite de pouvoir brasser toutes sortes d’ambiance geek, nous en fournissant plein les yeux !
La réalisation ne manque pas de souffle épique (atténué par le montage, mais nous y reviendrons), on sent la passion pour le média, et la force de volonté qu’il faut pour faire aboutir un projet pareil.
Les cadrages donnent une bonne variété de valeur de plans, avec de beaux plans larges en décors naturels (parfois un peu gratuit narrativement), mais il faut reconnaître que c’est agréable à regarder.
La photographie utilise un étalonnage assez poussé pour donner un aspect arty ou fantastique à des images tournées en vidéo, qui auraient un cachet trop amateur sans cela, mais ça ne remplace pas une véritable direction de la photo au tournage, avec de vrais éclairages.
Par exemple, dans les scènes nocturnes, les personnages se distinguent mal du fond, sans un liserai de lumière les éclairant par derrière…
Mais, avec ses faibles moyens, le réalisateur fait tout son possible pour faire de la « belle image » en retravaillant ses rushes.
Dans le premier monde, il use de couleurs chaudes en intérieur, froides à l’extérieur, bleutées la nuit, ce sont des stéréotypes, mais bien employés.
Dans le second monde, les teintes sont plus naturalistes, et le film propose ensuite des tonalités différentes, plus ou moins contrastées, pour chaque nouveau lieu...
Le montage est parfois trop lent, pas assez « cut » : pour les dialogues, les répliques ne sont jamais enchaînées à cheval sur les plans, chacun parle à son tour, lorsque la caméra est sur lui (avec rarement des plans de coupe sur ceux qui les écoutent), c’est un point sur lequel cette équipe amateur doit progresser.
Malgré tout, on ne s’ennuie pas, il se passe toujours quelque chose, dans ces 1h48, c’est déjà un exploit en soi.
Les décors sont très nombreux, et variés, c’est un des points forts du film, car c’est rare dans les productions amateurs (généralement se contentant d’une foret ou d’un terrain vague).
Malgré le budget extrêmement restreint, (mais « motorisés » par leur passion) ils ont pu tourner dans près d'une quarantaine de décors différents (aux quatre coins de la France et en domaine britannique, sur l'île de Jersey).
Ils ont pu bénéficier d'un grand nombre de beaux costumes, entre les participations reconstitueurs historiques, les GNistes, et autres paintballers, de plus l’univers proposé est tel que ça permet de placer différents looks improbables, en mélangeant les influences (ce qui est bien dans la mode actuelle steampunk).
Le héros a un beau look de cow-boy, ou du premier empire, au milieu de seconds rôles modernes ou médiévaux, cette variété est distrayante.
Les SFX numériques sont très nombreux, variés, et bien foutus.
C’est le réalisateur lui-même qui supervise, il connaît bien cette partie du travail, c’est le principal atout du métrage.
En plus de l’étalonnage constant, il y a de nombreux éléments en 3D infographique (l’ange de la mort, des engrenages, les tentacules géantes démoniaques, des vaisseaux spatiaux, des engins volants, un château fort, etc…), ainsi que des effets pyrotechniques (l’arc électrique, des explosions, la magie, etc…), c’est amusant et spectaculaire à souhait.
Bien entendu, il y a toujours un décalage entre les images vidéos filmées en live, et l’intégration des SFX (même propre), qui procure un côté nanar à l’ensemble, mais ça fait partie du charme général.
Le catalogue complet des possibilités d’After effects rajoute aussi au côté kitsch au film, cependant, encore une fois, ça fait vraiment partie du plaisir simple et décomplexé qu’il peut offrir.
Dans le casting, il y a des comédiens motivés et talentueux (pour un film amateur), ainsi qu'un invité prestigieux en la personne de Marc Cassot (voix française de Richard Harris/Paul Newman - VF de Dumbledore dans Harry Potter, de Bilbon Sacquet dans Le Seigneur des Anneaux, et bien d'autres), toutes ces personnes étant bénévoles.
Au total, c’est 36 acteurs, près de 90 figurants, et une bonne centaine de personnes, qui ont participé de près ou de loin à ce film.
Bien entendu, les acteurs sont tous un peu jeunes (à part quelques seconds rôles de roi ou d’amiral), ce qui confère aussi à l’ensemble un aspect kitsch.
La musique est sympathique, assez épique pour une composition au synthétiseur, mais on ne retient pas vraiment un thème ou une mélodie particulière (à part le générique final, qui s’éclate en toute liberté), il y en a des romantiques au piano, et des plus dark lors des passages gothiques.
En conclusion, ce film a encore certains défauts inévitables, inhérents à un tournage amateur, néanmoins il va aussi loin que possible dans la quantité impressionnante d’éléments qu’il déploie, et quand on réalise que 90% de ce qui nous fait dire « ah oui quand même ! » à l’écran est l’œuvre d’une seule personne, Guillaume Bouiges s’occupant presque tout seul de la postprod’, ça en devient encore plus impressionnant, et ça force le respect.
Je tire mon chapeau, donc, à ce collègue vidéaste aussi passionné, et j’espère en toute objectivité que « James Keane » trouvera son public.
Certes son scénario « fourre-tout » n’est pas son principal atout, mais il a au final une certaine folie, une démesure, qui m’a emballé, on y ressent l’enthousiasme des participants, même si on ne croit guère à ce que l’on voit, et ça fournit un spectacle tout à fait divertissant.
Je le conseille vivement aux rolistes et aux geeks de tout poils, il y en a pour tous les goûts, alors foncez les amis !!!
Une réponse de Guillaume Bouiges (le réalisateur lui-même), reçue par mail :
Bonjour Laurent
Merci pour cette critique détaillée, sincère et tres professionnelle !
Je prends toutes les remarques en compte avec intérêt :-) on va toujours en s'améliorant !
Pour ce qui est du montage lent par contre, c'est assez volontaire, j'aime cette façon de narrer et c'est un peu une marque de fabrique.
Je vous dis à bientôt et encore merci !
Guillaume
Une réponse de Ashley Levindhead (l'acteur principal lui-même), reçue par mail :
Je pense que c'est exactement la critique que devait recevoir le film d'un œil cinéphile.
Qui met le point sur les défauts évidents et à la fois qui rappelle les qualités du projet quand on tient compte des finances et des contretemps amateurs très contraignants dans ce genre de projet ambitieux.
On a trop l'habitude d'avoir des critiques de coincés-chauvins qui défoncent tout ce qui bouge sans véritable argument et ceux qui sont trop dithyrambiques pour ne pas vexer.
En général toujours des critiques qui ne dépassent pas deux lignes !
Artistiquement
Ash.