DIARY OF THE DEAD


ETATS-UNIS
De George A. Romero
Avec Michelle Morgan, Josh Close, Shawn Roberts

Des étudiants en cinéma tournent, dans une forêt, un film d’horreur à petit budget, lorsque la nouvelle tombe au journal télévisé : partout dans le pays, on signale des cas de morts revenant à la vie.
Témoins de massacres, de destructions et du chaos ambiant, ils choisissent alors de braquer leurs caméras sur les zombies et les horreurs bien réelles auxquels ils sont confrontés afin de laisser un témoignage de cette nuit où tout a changé.

 

MON HUMBLE AVIS :

 

George Romero revient une fois de plus au thème qui a fait sa célébrité, pour essayer de le traiter sous un angle différent de ses films précédents.
Comment trouver une approche novatrice alors que tant de films de zombies ont imité les siens ?

Pour Romero au crépuscule de son œuvre, la solution est dans l’introspection : ce qu’aucun remake ou contrefaçon ne pourra imiter c’est son point de vue personnel sur la société, alors cette fois on a droit à une version très intimiste de sa mythologie, où l’on sent que le vieux réalisateur se livre avec franchise et autocritique.
Il choisit de nous raconter une fois encore le moment où le monde sombre dans le chaos à cause du retour des morts à la vie, mais cette fois on découvre l’action par les yeux (et surtout les caméras) d’une équipe de tournage.
Au départ, ces étudiants en cinéma étaient censés tourner un petit film d’horreur sans prétention, mais ils vont saisir l’opportunité de devenir les documentaristes de la fin du monde.
Sachant que Romero lui-même est un ancien étudiant de cette université de Pittsburgh en Pennsylvanie, et qu’il a davantage gagné sa vie comme documentariste qu’avec ses longs métrages, il y a d’office un parallèle évident entre le réalisateur et son personnage principal, un jeune cinéaste compulsif pour qui rien n’existe si ce n’est devant son objectif.

 

Alors le sujet du film devient davantage cette vision déformée de la réalité du monde que nous avons à travers les médias, que la prolifération des zombies…

Romero l’a déjà tellement raconté qu’il ne considère plus comme central de s’appesantir dessus.
Tout au plus il semble s’amuser avec les techniques digitales pour représenter des idées gores difficilement réalisables en maquillages traditionnels, mais son sujet principal est ailleurs.
Ce qui l’intéresse, ce n’est pas tant de brocarder les médias pour les diaboliser que de plutôt s’autoparodier comme acteur de cette déformation du réel.
C’est comme une confession, ce personnage qui est finalement un junkie de la caméra incapable de s’impliquer réellement dans la vie autrement que pour la filmer, c’est un peu lui évidemment.
Dans ses interviews, Romero s’est toujours défendu du sous texte politique que la critique a voulu voir dans son œuvre (du moins pour « La nuit des morts vivants » et son acteur principal noir, un hasard de casting selon lui), on peut donc tout à fait le rapprocher de ce jeune souhaitant juste faire un petit film d’horreur, sur qui tombe malgré lui les responsabilités d’une satire sociale le dépassant…
A plusieurs reprises dans le film, Romero montre qu’on ne peut plus comprendre le monde d’aujourd’hui à cause d’une trop grande quantité d’informations contradictoires (médias omniprésents, Internet, mondialisation de l’information, etc…), comme s’il s’excusait presque d’avoir exprimé un point de vue engagé (voire satyrique) dans ces films précédents.

 

La mise en scène est très rusée, car en utilisant les images vidéos filmées par ses personnages, elle renforce l’identification et crédibilise le récit malgré son argument de départ fantastique, mais surtout, loin de se contenter d’un seul point de vue comme tant de films « à la Blair Witch » (rien que cette année dans ce festival : REC & Cloverfield), elle s’offre la possibilité d’un montage ingénieux entre les différentes sources (caméscopes, caméra de surveillance), et même d’ellipses osées (pannes de batterie, militaires obligeant à couper).
Le procédé de caméra embarquée n’entraîne donc jamais d’images tressautantes ou de cadrages hasardeux, puisque le choix du montage est au final aussi large qu’avec une mise en scène traditionnelle.
D’ailleurs le fait même que des documentaristes ne peuvent s’empêcher de mettre en scène la réalité qu’ils sont censés retranscrire objectivement est intégré dans le film, puisque le héros fait parfois répéter leurs dialogues aux autres, voir les fait refaire leur entrée de champ par exemple…
Comme l’a fait remarquer Stuart Gordon, fin cinéphile et président du jury, le procédé du faux documentaire n’est pas nouveau puisqu’il date du « Cannibal Holocaust » de Deodatto, mais il semble revenu à la mode.
« Diary of the dead » est enfin le plus marrant des films de zombies de Romero car il y a de nombreuses répliques qui font mouche, ainsi qu’une savoureuse mise en abîme des stéréotypes de la série B horrifique, sans compter ce formidable personnage d’amish sourd et muet qui flingue les morts vivants à la faux et à la dynamite…

Rien que pour lui ça aurait du s’appeler « AMISH OF THE DEAD » !