NI DIEUX NI MAÎTRES

Film français se déroulant à l’époque médiévale, ce film raconte une jaquerie de paysans, révoltés contre le droit de cuissage du noble local...

Non seulement celui-ci couche avec les jeunes mariés à la nuit de noces, tradition visiblement acceptée depuis des générations, mais cette fois il vient chercher une vierge même pas fiancée, juste parce qu’elle flirte avec un étranger.

En plus, il assassine au passage le vieux sage du village, alors cette fois c’en est trop, il ne faut pas se laisser faire...

L’étrange message de ce film au scénario bancal semble être une métaphore de la grogne sociale des exploités contre les dirigeants qui les enculent (ici au sens propre) !

La réalisation est mollassonne au possible, c’est si somnifère que je vous le conseille en cas d’insomnie.

Les cadrages proposent pourtant une bonne variation de valeurs de plans, dont quelques larges exploitant à merveille les capacités des décors.

La photographie est plutôt jolie, dans des camaïeux brun-vert, une palette automnale très picturale.

Il y a aussi des intérieurs éclairés aux bougies, lampes à huile, et autres cheminées, du plus bel effet : les lumières tremblent, renforçant les hésitations des protagonistes troublés.

C’est donc de la belle photo, utilisée intelligemment.

Le montage est le point faible du film, trop mou, trop lent.

Des scènes de remplissage sans intérêt suivent des passages expédiés trop vite alors que c’est ceux qu’il aurait fallu développer...

Comme souvent avec le cinoche français, on dirait qu’on ne veut pas se salir les mains à faire réellement du cinéma de genre : un vengeur mais pacifiste, des chevaliers mais bourrés, un viol collectif (incestueux en plus) sans conséquences psychologiques et suggéré comme si c’était un passage romantique, bref ça évite son propre sujet et ça brode dans les moments creux...

Les décors proposent de la forêt, un village esquissé en peu de choses, un intérieur d’auberge, et un petit château en ruines.

C’est peu de choses, mais arrangé avec le talent du directeur de la photo, ça passe la plupart du temps.

Le château fait quand même trop dépouillé à mon goût, du coup ça nous sort de la réalité qui nous est contée (déjà pas bien réaliste).

Les costumes sont sobres mais  corrects, ce sont de bonnes reconstitutions d’époque.

Notons dans les accessoires quelques armes originales (chaînes de prisonnier, hache de bûcheron, marteau de guerre, serpette de guérisseuse, bâton de pèlerin) face aux épées des vétérans des croisades.

Les sfx se limitent aux maquillages des peu crédibles lépreux (qui courent et se battent malgré la maladie), les meurtres étant surtout hors champ.

La meilleure scène d’effets spéciaux reste les soins de la guérisseuse sur le bras du héros au début du film, où l’impression du creux dans la blessure est particulièrement réussi.

Le casting est un élément intéressant du métrage, puisque de vieux acteurs connus comme Edith Scob (Les yeux sans visage) ou Jean Claude Drouot (Thierry la fronde) partagent l’écran avec de nouveaux venus prometteurs.

Tous sont charismatiques et surtout photogéniques, malheureusement leur jeu est trop théâtral.

Le texte fait récité et non vécu, les pauses ne sont pas naturelles, on y croit peu...

De plus la figuration est trop faible, il n’y a clairement pas assez de monde à l’image pour coller au récit, six personnes représentent le village, et autant la cour du châtelain.

Et que dire de ce personnage d’arabe échappé d’une prison française... à l’époque en question (quelques décennies après les croisades), la notion de prison n’existe même pas, et si cet arabe avait été fait captif durant des batailles dans les pays musulmans, pourquoi donc l’aurait-on ramené en France ?

Si on veut traiter d’histoire, sur un ton sérieux, on se documente un peu, on ne fait pas du révisionnisme !

La musique est trop absente, surtout dans les rares scènes d’action qu’elle aurait pu souligner.

On y entend aucune mélodie mémorable, ce qui a grandement contribué à mon endormissement progressif.

X+

En conclusion, je ne peux pas conseiller ce film, ni aux amateurs de fresques historiques (intimistes comme épiques), ni à ceux qui chercheraient de bonnes scènes d’escrime !

C’est surtout déplacé de traiter du viol avec autant de détachement, ce n’est plus de la pudeur à ce niveau là, c’est surtout passer à côté de son sujet, et c’est contre productif : c’est comme en édulcorant la violence, on finit par se la représenter comme quelque chose de pas si grave.

Ici c’est pareil, pourquoi choisir un sujet pareil si on a peur de filmer quoique ce soit ?