BAD CAT

(Kötü Kedi Şerafettin)

 

Réalisé par Ayse Ünal, et Mehmet Kurtulus


L'Avis du NIFFF :

Shero est un chat tout ce qu’il y a de plus normal : sa vie de débauche est rythmée par la boisson, la nourriture et les conquêtes sexuelles.
Alors qu’il est sur le point d’entamer une soirée barbecue avec ses potes Riza le rat et Rifki la mouette, le voilà qui se retrouve impliqué dans un homicide et engagé dans une poursuite infernale.
Tout droit sorti du plus grand studio d’animation turc, le délirant Bad Cat fait passer Ted pour un enfant de chœur.

 

L'AVIS DU BIFFF :

Malgré son poil soyeux et ses faux airs de Garfield vu de dos, méfiez-vous de Shero : c’est le chat le plus infâme que la Terre ait jamais porté !

Alcoolique convaincu, Shero règne en despote sur son quartier et terrorise les siamoises non castrées quand il n’est pas en train de fumer son herbe à chat.

Un beau jour, alors qu’il se sent d’humeur à faire ses griffes sur la gueule d’un nouveau-né, Shero croise la route de Misskat, perfection incarnée de l’angora turc, dont les feulements suaves donnent envie de lui casser les pattes arrière d’un bon coup de rein.

Malheureusement, Shero va devoir s’asseoir sur une glacière afin de calmer ses ardeurs, le temps de régler un petit malentendu.

Bon, pour être tout à fait honnête, le malentendu en question est un être humain récemment défenestré par Shero.

Et s’agit pas non plus de minimiser ce genre de tuile, surtout quand ladite tuile revient à la vie – malgré le cerveau qui prend l’air dans sa boîte crânienne fracassée – et souhaite se venger de Shero en lui faisant bouffer sa litière une bonne fois pour toutes !

Pour une fois qu’on a de bonnes nouvelles de la Turquie, on ne va pas s’en priver !

Inspiré du comics de Bülent Ustün, Bad Cat est un mélange jubilatoire de Fritz le Chat et de Sausage Party en passant par le Ted de Mac Farlane.

Autant dire que ça jacte vulgos, que c’est méchant, violent, teigneux et irrévérencieux à souhaits : bref, c’est un véritable bain de jouvence pour tous les détracteurs du prêt-à-penser politiquement correct, et ils sont heureusement très nombreux si l’on en croit les nombreuses nominations glanées par Bad Cat au NIFFF, à Fantasia ou encore à Sitges !

 

Mon Humble Avis :

Deux réalisateurs associés pour leur premier film, sélectionné au festival d'Annecy, sont parvenus à une animation fluide de qualité, dans une reconstitution numérique d'Istanbul impressionnante, dont on profite au maximum grâce à une prise de vue aérienne jouissive.

Avant de faire cette réalisation, Mehmet Kurtulus et Ayse Ünal ont tous les deux mis sur pieds plusieurs publicités.
Le premier est le fondateur de la société de distribution de Bad Cat.
Quant à sa collègue, elle soutient activement la structure puisqu'elle collabore au développement des projets d'Anima Istanbul.
Ce long-métrage est en fait une adaptation d'une série de romans graphiques (beaucoup plus trash) du même nom du dessinateur Bülen Üstün.
C'est en 2015, à Cannes, que les droits de transposition ont été vendus à l'entreprise australienne Odin's Eye Entertainement.
Un peu plus d'un an après, l’œuvre a été vendue en Turquie et a été présentée au 35ème Istanbul Film Festival.

 

Le message reste moralisateur, malgré l'humour potache, puisqu'il est question d'amour filial, et d'amitié.
Notons que le film est totalement laïc, dans le sens où aucune allusion n'est faite à l'islam.
Par contre, on peut être étonné du nombre d'allusions faisant référence à la pop culture occidentale, et surtout au cinoche hollywoodien.

La réalisation est suffisamment délirante pour qu'on se laisse entraîner par ce film imprévisible.

Les cadrages sont libres de toute entrave, puisque c'est en synthèse, et les deux réalisateurs ne se privent pas d'utiliser des prises de vues impossibles en live, caméra volante au travers de la ville, accompagnant des chutes vertigineuses, et exagérant les effets de la perspective pour donner encore plus d'impact à la 3D.
Sinon toutes les valeurs de plans imaginables sont utiles, comme dans tout cartoon efficace.

 

La photographie est bien colorée, avec des contrastes forts.
Il n'y a pas de jeu d'ambiance lumineuse, ou de camaïeu de couleur, la plupart du temps l'image est assez multicolore.

Le montage est énergique sans excès.
Ça suit surtout le rythme des gags, plus dans les dialogues et situations que des gags visuels, car on est pas dans du dessin animé pour enfants.
C'est beaucoup moins frénétique qu'un kung fu panda par exemple...

Les décors sont effectivement impressionnants de détails et de précisions.
On croit vraiment à ce petit quartier populaire d'Istanbul, coloré et vivant.
Beaucoup de séquences ont lieu sur les toits.

 

Comme le film est animé en synthèse (en plus en 3D) c'est en quelque sorte un sfx permanent.
Néanmoins saluons le travail fait sur l'animation de l'eau, vraiment crédible, surtout au contact des fourrures.

Le design des personnages est caricatural (mais tout à fait fidèle à ceux de la BD originale).
Le gros chat évoque à la fois Garfield pour le côté râleur, et Frizz The cat de Bakshi pour le côté obsédé.
Il a pour amis un oiseau et un rat, plutôt étonnant pour un chat !
Leur expressivité est bien développée.
Le vilain, un dessinateur de comics trépané mais zombie, est bien croquignolesque, avec des expressions outrées au possible !
Ce personnage évoqué curieusement celui de Peter Jackson dans son premier film Bad Taste...

 

La musique associe mélodies traditionnelles turques et guitares rock n'roll.
On entend un violoncelle diégétique assez insupportable.
La BO tourne souvent au blues jazzy, peut être une allusion aux Aristochats.

En conclusion, ce film est à conseiller à touts ceux qui trouvent l'animation trop lisse d'habitude...
Pas aussi politique et intelligent qu'un Bakshi, mais original dans son premier degré purement comique de mauvais goût provocateur !

 

 

La Bande dessinée d'origine, de Bülen Üstün, est beaucoup plus politiquement incorrecte, jugez plutôt :